Tisser du lien autour des personnes âgées isolées,

portraits tricotés de trois saint-gilloises. 

Le contexte

Danielle, Christiane et Claude vivent à Saint-Gilles. Cette  commune se caractérise par sa mixité sociale et ses inégalités et est répartie géographiquement entre sa partie haute, en processus de gentrification, et sa partie basse, à proximité de la Gare du Midi, qui est la principale porte d’entrée de la Ville. Le Bas de Saint-Gilles est vivant et commerçant. Sa population y est populaire, immigrée, parfois précarisée, voire en errance. C’est dans cette partie de la commune que résident les femmes dont nous avons réalisé ces portraits filmés. 

Les enseignements que nous avions tirés de nos précédents recueils de témoignages, établissait que la qualité des liens que les personnes tissent autour d’elles est déterminante pour leur bien-être physique et mental. Cela d’autant plus si elles vivent seules et qu’elles portent avec elles un parcours de vie éprouvant.
Le Covid désormais derrière nous, c’est avec l’intention de questionner ces liens, leurs formes diverses : familiales, amicales, de voisinages, de bénéficiaires de services culturels, sociaux ou médicaux que nous sommes allés à la rencontre de nouveaux personnages, , en ayant recours à un média distinct de ceux utilisés précédemment, la vidéo, afin d’éprouver une autre forme d’empathie. 

Ce chapitre réaffirme l’importance des liens sociaux, tout en développant davantage ce que cela signifie pour chacune .  

Danielle

Suite à une opération à la jambe, Danielle n’est pas sortie de chez elle depuis 18 mois. Elle vit seule, cloitrée dans son petit appartement situé au 8ème étage d’une tour en mauvais état. Son isolement est tel une carapace qui la maintient à distance de l’hostilité sociale à ses pieds et des désillusions d’une vie qui l’ont éloignées de sa mère, de ses filles et de relations amoureuses parfois violentes. Sous cette carapace, Danielle a construit un refuge où elle a su s’entourer de sa nouvelle famille : sa tortue, ses voisines et les travailleur·ses des services d’aide à domicile. Elle vit la porte de son appartement ouvert, dans un monde multilingue aux parfums d’ailleurs, animée d’une soif de jeunesse, d’une foi innocente et de rêveries tiktokiennes de prince charmant.      

Christiane

Christiane vit à peine plus haut dans le quartier, dans les hauteurs d’un logement social où elle et son mari ont élevé 6 enfants. Pourtant, ce n’est que depuis qu’elle est pensionnée des services de la commune, qu’elle découvre ses voisins, son quartier et les associations à proximité. Auparavant, elle n’avait pas le temps de penser à elle. Désormais, elle peut faire ce qu’elle veut, quand elle le veut! Profiter de ses enfants et de ses petits-enfants, aller à la mer, s’investir dans un projet communautaire de partage d’énergie, tricoter pour celles et ceux qu’elle aime. Soit autant d’acti

Claude

Claude tricote également. Elle le fait sans cesse depuis plus de 30 ans. Offrir ses créations est sa manière d’exprimer toute la tendresse qu’elle a pour ses proches. Mais c’est aussi un moyen pour elle de transfigurer les blessures qu’elle porte. Après avoir lutté toute sa vie contre toutes les formes d’injustice, y compris par l’engagement politique, syndical, social ou artistique, Claude recherche désormais la paix. Elle la crée dans les Cafés Tricot qu’elle anime bénévolement trois fois par semaine dans divers lieux publics ou communautaires. Là, se retrouvent des femmes de divers horizons pour y cultiver un savoir-faire, mais aussi un savoir vivre fondé sur la sororité.